PARIS - Déçus par le discours attentiste de la Banque centrale
européenne (BCE), les marchés financiers sont une nouvelle fois entrés en
ébullition, au risque de voir l'Espagne et l'Italie être la cible de leurs
attaques dans les semaines qui viennent.
Les propos du président de la BCE, Mario Draghi, ont douché les espoirs des
investisseurs d'une intervention rapide pour apaiser les tensions en zone euro,
faisant plonger les places boursières et grimper les taux obligataires.
"C'est reparti !", prévient Philippe Waechter, économiste en chef chez
Natixis AM.
"Le marché a mal réagi parce que la BCE n'a pas fourni de réponse immédiate,
se contentant plus de paroles que d'actes", résume Christian Parisot, économiste
chez Aurel BGC.
La BCE a pourtant prévenu qu'elle était disposée à agir, si besoin par des
mesures exceptionnelles, qui pourraient passer notamment par des achats de dette
publique sur le marché, plutôt sur des échéances de court terme.
"Il va y avoir de rudes négociations dans les semaines à venir pour trouver
le moyen de réactiver les rachats d'obligations en obtenant l'accord des
Allemands", souligne toutefois les analystes du courtier Newedge.
Mais de l'avis des analystes, la principale contrariété des marchés est liée
au fait que la BCE a indiqué ne vouloir agir qu'avec les fonds de secours
européens, ce qui oblige les pays en difficultés à demander une aide.
Les attentes étaient pourtant grandes depuis un discours de M. Draghi jeudi
dernier, qui avait soutenu les marchés financiers.
"Le problème est qu'avec les propos tenus récemment par M. Draghi, qui a dit
que la BCE ferait tout pour préserver l'euro, les marchés attendaient plus" pour
la réunion de jeudi, observe Howard Archer, économiste chez IHS Global
Insight.
Du coup, rien ne s'oppose à ce que de nouvelles tensions affectent les pays
vulnérables de la zone euro, principalement l'Espagne et l'Italie, d'autant que
le mois d'août est traditionnellement dépourvu de rendez-vous majeur.
"Il y a une forte probabilité que les marchés testent ces pays", estime M.
Parisot.
Les marchés pourraient vendre à nouveau en masse les titres de dettes de ces
pays, ce qui ferait grimper en flèche leur taux d'emprunt.
De nombreux investisseurs traditionnels sont en outre absents lors des mois
d'été ce qui laisse le champ libre à des acteurs plus spéculatifs et enclins à
s'attaquer à la zone euro.
Des taux prohibitifs, largement au-delà des 7% pour les échéances à 10 ans,
serait intenables et contraindraient alors peut-être l'Espagne et l'Italie à
demander du secours.
Pour l'instant, l'Espagne refuse toute demande d'aide à l'Europe parce que le
recours aux fonds européens est conditionné à des mesures contraignantes pour
les finances publiques au moment où le pays subit une grave crise économique et
s'enfonce dans la récession.
Le chef du gouvernement italien, Mario Monti, a lui affirmé jeudi après la
BCE qu'il devrait "examiner" les modalités de recours au fonds d'aide européen
avant une éventuelle décision d'y recourir ou non.
Au total, "le risque majeur est que tout le monde soit perdant. Qu'est-ce qui
va se passer si l'Espagne et l'Italie ne demandent pas d'aide ?", s'interroge M.
Waechter.
Pourtant, relèvent les analystes, un peu amers, la BCE affirme clairement
qu'elle jouera tout son rôle pour préserver l'euro, dans le cadre de son
mandat.
"Les marchés savent qu'une solution existe, sans être nécessairement obligés
d'avoir un nouveau sommet de la dernière chance. C'est un filet de sécurité,
mais il manque une réponse de court terme", selon M. Parisot
AWP
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